L'environnement - 03 - Ressources mellifères
Article de Briane Gérard et Cabrol Jean-Luc « L'abeille dans le géosystème : essai de cartographie des ressources mellifères. » dans la revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest, 1986.
Il est nécessaire de déterminer des « saisons mellifères » où la biologie et le comportement des abeilles coïncident globalement avec la phénologie des plantes.
- De Février à Mars : le démarrage du couvain.
Dès les premiers beaux jours, la reine commence à pondre ; les ouvrières reconstituent les réserves de pollen (très périssables) en exploitant les moindres ressources alors disponibles : elles butinent des espèces à la fois nectarifères et pollinifères (saules) ou très souvent, des plantes exclusivement pollinifères (noisetier ; buis ; les abeilles se procurent enfin de la propolis sur les trembles.
Le milieu végétal n'est pas exploitable sur toute sa surface par les abeilles et que seuls des secteurs précis recèlent des potentialités mellifères : des secteurs linéaires (bords de routes, lisières de friches hautes, bords des eaux, haies, etc., comprenant principalement différentes espèces de saules et le noisetier), des masses homogènes (friches, taillis) qui accueillent abondamment le buis, des secteurs ponctuels (bords de chemins, jardins, friches) où se retrouvent des espèces apicoles peu abondantes : prunelier et tremble.
- D'Avril à Mai : la constitution de la ruche.
Les jeunes abeilles butineuses sortent en grand nombre pour faire face aux nombreux besoins de la colonie. Les larves consomment du pollen et les abeilles du nectar pour assurer leur nourriture. La diversité des espèces végétales apicoles en voie de floraison augmente et leur distribution s'étend dans le milieu végétal.
En forêt, deux espèces arborées sont disséminées sur de vastes étendues : le merisier, qui fournit nectar et pollen, et l'érable champêtre, qui n'apporte que du nectar. Les friches hautes recèlent de nombreuses espèces mellifères : différentes aubépines, la bourdaine, le cornouiller sanguin. Dans les prairies, les butineuses peuvent rencontrer le pissenlit, le lotier, la cardamine des près ; ce milieu semble toutefois moins fréquenté à cette période que les précédents. Enfin quelques ressources ponctuelles, surtout constituées par des arbres fruitiers sont disséminées dans les prairies, vergers et jardins.
- De Juin à Juillet : la miellée principale.
Durant cette période du début d'été, les ressources mellifères sont considérables. C'est à ce moment que l'apiculteur fera la récolte de miel la plus abondante de l'année. La carte traduit bien, par la variété et la densité des phénomènes représentés, l'importance de ces potentialités.
Une masse homogène se dégage en premier lieu, constituée par le châtaignier, qui est l'essence mellifère primordiale à cette époque ; de plus, des individus dont l'exposition diffère ne fleurissent pas pendant la même période : ce décalage de floraison laisse le loisir aux abeilles d'exploiter cette réserve plus longtemps ; on note également la présence du miellat sur les feuilles du châtaignier.
Les masses de contenu hétérogène ne sont pas négligeables : les friches basses regorgent de ronces très visitées par les abeilles ; les prairies, malgré leur richesse floristique, ne sont que très peu exploitées en cette période.
Des espèces telles que tilleuls et robinier sont disposées de façon ponctuelle dans les prairies, bords de routes ou bois, mais assurent cependant un rôle important de fournisseur de nectar.
Les abeilles se consacrent donc principalement à quelques espèces et négligent, voire ignorent, de multiples espèces fleuries, qui seront toutefois visitées ultérieurement.
- D'Août à Octobre : le pré-hivernage.
Cette dernière période contraste avec la précédente mais rappelle
Février-Mars. En effet, les ressources mellifères sont alors plus limitées et plus localisées ; toutefois il existe une importante diversité d'espèces apicoles que l'on retrouve généralement distribuées de façon linéaire ou ponctuelle. Ce sont le bord des routes, le long de cours d'eau, les friches basses qui accueillent différents cirses, l'angélique, l'eupatoire, la reine des prés, la balsamine d'Inde, etc. D'autre part, les prairies de fauche recèlent, à cette époque et de façon relativement homogène, toutes sortes de menthes, de scabieuses, de centaurées, etc. Quant aux rares cultures présentes dans la vallée étudiée, seul le maïs fournit une source de pollen abondante et recherchée. Enfin, certains milieux ponctuels ne sont pas à négliger : c'est le cas de rares landes à bruyères, celui du lierre, dernière espèce à fleurir et qui a, ici, la particularité d'être abondant sur tous les bâtiments plus ou moins abandonnés.
La région étudiée semble propice à la production de crus de miel de châtaignier et, secondairement, de ronce et de tilleul. Ce dernier, qui a un plus grand intérêt commercial, doit faire l'objet d'une analyse plus détaillée dans le temps et dans l'espace. Dans ce secteur d'étude, les abeilles visitent plus de 170 espèces de plantes dont un certain nombre est délaissé en plaine : euphorbe, hellébore, maïs, gui, etc. La diversité taxinomique des plantes apicoles augmente du printemps à l'été mais, parallèlement, l'attractivité spécifique tend à décroître globalement durant la même période : une espèce donnée est généralement plus attractive au printemps que durant l'été où elle est concurrencée par de nombreuses autres espèces mellifères.
L'exploitation du milieu végétal par les abeilles est variable tout au long d'une année.
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